La Table d’émeraude
et son symbolisme
- Les deux mondes
- Le Un
- 4 éléments
- Le royaume est ici
- Solve
- Coagula
- Synthèse
- Hermès Trismégiste
Sommaire
Publié le
La table d’émeraude est un des textes les plus connus dans la tradition alchimique.
Comme dans tous les textes alchimiques, ce texte renferme des clés qui ne sont pas données directement. C’est au cherchant de les découvrir et de les interpréter.
J’en donne ici un éclairage, mais il est bien de se rappeler que l’important est d’en faire ses propres interprétations.
Les textes sont là pour montrer la voie, mais c’est à l’initié de l’emprunter et de vivre par lui-même ce que d’autres avant lui ont vécu et transmis.
Dans cet article les termes Mercure, Soufre et Sel font référence à des principes et non aux matériaux du même nom.
Pour en savoir plus sur les bases de l’alchimie : article sur l’alchimie
Les deux mondes
“Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut ; et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, pour faire les miracles d'une seule chose”
Ce qui est en bas fait référence au monde des hommes. Le monde matériel. Ce qui est en haut, nous renvoie au monde spirituel, l'immatériel. Le monde des dieux.
Ici il est dit que ces deux mondes fonctionnent de la même manière. Ainsi, en comprenant le monde qui nous entoure, on comprend le monde spirituel. À l’aide de l’accessible, on atteint l’inaccessible.
Tout le principe de l’alchimie repose sur ce principe. Par la compréhension de la nature, on comprend les mécanismes qui régissent le monde spirituel.
Cela va même plus loin. Par résonance, les actions dans le monde d’en bas agissent aussi sur le monde d’en haut. En travaillant sur la matière en essayant de faire la pierre, l’alchimiste travaille sur sa propre rectification.
L’inverse est vrai aussi, le monde d’en haut agit sur le monde d’en bas.
Pour faire la pierre philosophale, l’alchimiste a besoin du monde d’en haut, sans cette composante l'œuvre est impossible à réaliser
La dernière partie de la phrase : Pour faire le miracle d’une seule chose, indique que ce ne sont pas 2 mondes séparés. Ils sont une seule et unique chose.
La séparation n’est qu’une illusion. De la même manière dans le monde physique, il n’y a pas de limite franche entre 2 couleurs du spectre de la lumière.
De même que pour la lumière visible et invisible. La frontière entre l'infrarouge et le rouge ou le violet et l’ultra-violet n’existe pas vraiment. Il y a une continuité.
La frontière vient de notre perception, mais d’un point de vue objectif, il n’y en a pas.
De la même manière, le monde matériel et spirituel est une seule chose. Deux extrémités d’un seul et même spectre.

Le Un
“Et comme toutes les choses ont été, & sont venues d’un, par la médiation d’un : ainsi toutes les choses ont été nées de cette chose unique, par adaptation.”
Tout ce qui est est porte en lui le même élément créateur. Ce ne sont que des manifestations différentes, mais la substance est la même.
Un grand mystère dans l'œuvre est de trouver la matière première. C’est justement la première matière, la première manifestation de cet élément créateur.
Dans une flûte, toutes les notes de musique ont un élément commun qui est le souffle. Pour devenir un son, le souffle a besoin de passer à travers la flûte et de prendre une forme (note).
Le Un c’est le souffle, les notes sont les choses manifestées dans le monde
Tout ce qui est, bien que différent dans sa manifestation, porte en lui la même substance.
4 éléments
“Le soleil en est le père, la lune est sa mère, le vent l’a porté dans son ventre ; la Terre est sa nourrice”
On retrouve ici les 4 éléments : Le soleil représente le feu, la lune représente l’eau, le vent est l’air et la terre est évidemment la terre.
La notion de soleil et lune est très importante en alchimie, on la retrouve dans énormément de gravures. Cela dépasse le simple élément feu et eau. Il s’agit de principes.
Le soleil est le principe actif, émetteur. La lune est le réceptacle.
Trouver le Un ne suffit pas.
Le soleil enseigne à manifester cette substance, l'insuffle dans la matière. La lune représente la faculté de cette matière à accueillir cette substance sans y faire résistance.
Le vent, qui représente l’air, symbolise le lien entre le monde d’en bas et le monde d’en haut. L’espace entre matière et esprit. Il est le pont entre monde matériel et monde spirituel.
La terre symbolise le creuset, qui se trouve sur terre. C’est l’objet de la phrase suivante.
Le royaume est ici
“Le père de tout le telesme de tout le monde est ici. Sa force ou puissance est entière, si elle est convertie en terre.”
Le telesme est le but final de l’alchimiste. La réalisation complète de l'œuvre.
L’essence de l'œuvre alchimique est de se manifester dans la matière.
C’est en cela qu’elle dénote avec certaines traditions spirituelles qui ne cherchent qu’une élévation de l'âme en se détachant de la matière. L’alchimiste au contraire cherche à manifester l'âme dans la matière.
Comment ? C’est l’objet de la suite du texte.
Solve
“Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l’épais doucement, avec grande industrie”
On entame ici la première partie de l'œuvre : dissoudre.
Le but de cette opération est l’extraction du pur.
Pour l’alchimiste, le Un est mélangé à la matière. Cette phase est consacrée à séparer et dissociée, pour qu’il ne reste que l’essence pure.
On cherche ici à trouver la dimension spirituelle dans sa forme la plus pure, détachée de la matière.
C’est dans cette phase que l’on peut être amené à passer par des phases de mort apparente (mort des apparences). Tout ce qui peut mourir meurt et ne reste que la partie immortelle.
Mais c’est avant tout un travail méticuleux (doucement - avec grande industrie), ou l’initié doit apprendre à reconnaître et dissocier ce qui fait partie du subtil (spirituel) et épais (matière)
Ce n’est pas toujours aussi évident qu’il peut le sembler. L’épais (matière) ne fait pas uniquement référence au corps physique. L’homme est animé de forces intérieures liées à la matérialité.
L’instinct de survie ou de nécessité de perpétuer l’espèce sont des forces liées à la matière.
Dans cette étape, l’initié doit apprendre à dissocier son inspiration profonde de sa pulsion animale.
Certaines religions se sont arrêtées là. Ce qui engendre se rejet de la matière et de ce qui est lié à elle. On rejette l’épais, les pulsions humaines, jusqu’à les qualifier de “mal”.
Ce n’est pas le cas de l’alchimiste qui va, une fois cette dissociation effectuée, chercher à coaguler ces deux forces…
Coagula
“Il monte de la terre au ciel, et derechef il descend en terre, & il reçoit la force des choses supérieures et inférieures. Tu auras par ce moyen la gloire de tout le monde et pour cela toute obscurité s’enfuira de toi “.
Après avoir dissocié ces deux forces, il est temps de les rassembler. Le subtil se mélange à l’épais et le rectifie.
Une notion importante c’est que l’alchimiste cherche la transmutation de l’ombre en lumière, pas sa destruction.
“La force des choses supérieures et inférieures” : il y a dans l’épais des forces à libérer.
L’initié ne cherche pas à détruire ou nier son animalité ou ses ombres. Il cherche à les transmuter. C'est-à-dire à les ennoblir pour qu'elles deviennent une force lumineuse au service de sa conscience.
L’ombre n’est pas détruite par la lumière, elle devient elle-même lumière par l’action de la lumière.
Synthèse
“C'est la force forte de toute force : car elle vaincra toute chose subtile, et pénétrera toute chose solide. Ainsi le monde a été créé. De ceci seront & sortiront d'admirables adaptations, desquelles le moyen en est ici.”
“C’est la force forte de toute force” nous apprend que c’est la force qui dépasse toutes les autres.
On peut renforcer son corps et acquérir la force du corps. On peut renforcer sa volonté et acquérir la force du mental. Mais une force est la mère de toutes les forces, la force de l’esprit.
“Elle vaincra toute chose subtile et pénétrera à toute chose solide”. Cette force rectifie à la fois le corps (solide) et le mental (subtil).
Une des finalités de l'œuvre est la médecine universelle. L’alchimiste à la conviction que par cette force, il peut régler tous les maux. Qu’ils soient physiques ou psychologiques.
Hermès Trismégiste
“C’est pourquoi j'ai été appelé Hermès Trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie de tout le monde. Ce que j’ai dit de l'opération du Soleil est accompli, et parachevé.”
L'opération du Soleil fait référence à la pierre philosophale. C’est intéressant de voir qu’on nomme la pierre avec le Soleil, qui est un des éléments nécessaires, mais pas l’ensemble. En réalité, ça fait écho à une phrase que l’on entend chez beaucoup d’alchimistes: “Le Mercure seul suffit”. Les autres éléments ne sont là que pour permettre au Mercure de se manifester.
Hermès dans la mythologie grecque est le messager des dieux. Mais c’est aussi l’autre nom du mercure. Encore une fois, on voit l’importance du Mercure philosophale

Caducé d'Hermès
On associe Hermès à son caducée, symbole de la médecine, mais c’est aussi le symbole de l'œuvre alchimique.
Les 2 serpents représentent l’union des 2 principes, soufre et mercure autour d’un élément commun (sel).
Le terme “Trismedistre” fait référence aux trois oeuvres (noir, blanc, rouge). Mais ça fait aussi référence aux trois plans :
- Physique : corps
- Énergétique : pensées, émotions
- Spirituel : Âme, esprit
La table d’émeraude est un résumé du grand œuvre. Elle offre une vision globale et synthétique des grands principes.
Elle peut servir au débutant, qui désire comprendre les fondements de l’art alchimique. Mais aussi à l’initié qui peut s’y référer pour s'assurer d'être sur le bon chemin.
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Emilien V.